Acquisition d’un véhicule en Algérie : Mieux vaut attendre
Le marché de l’automobile en Algérie est véritablement sens dessus-dessous. Tous les paramètres d’un fonctionnement normalisé ont été biaisés par des décisions et des contre-décisions qui ont, en définitive, «offert» au client algérien un voyage dans le temps, celui des pénuries, de la domination sans partage de l’occasion, de l’envolée des prix, de l’absence de prestations de service après-vente et d’une généralisation de la pièce de rechange contrefaite.
Une situation inquiétante dont l’issue est loin d’être assurée et qu’on pensait à jamais révolue.
Si pendant deux décades, l’acquisition d’un véhicule était banalisée et simplifiée au détour d’un des nombreux showrooms de marques automobiles qui pullulaient dans le pays, aujourd’hui, ce geste relève d’un exercice de haute voltige, tant l’espoir de voir ce rêve se concrétiser s’estompe de plus en plus. Les importations ont été définitivement suspendues et les ateliers d’assemblage de kits ont baissé rideau.
La norme universelle de régulation de tout marché, en l’occurrence l’offre et la demande, se trouve, alors, fortement déséquilibrée. Une demande à croissance exponentielle et une offre presque inexistante.
Véhicules neufs, le haut de gamme en force
Les perturbations profondes provoquées par la démarche de Bouchouareb et l’état d’inertie totale provoqué par le séisme judiciaire qui continue de frapper le secteur ont accentué sa dérive vers l’informel. Avec l’effondrement généralisé des structures conventionnelles et standardisées de représentation, de commercialisation, de garantie et de prestations de qualité, l’activité de vente de véhicules neufs est, de ce fait, reprise par un réseau de revendeurs multimarques qui se sont spécialisés dans l’importation à l’unité de modèles haut de gamme de marques prestigieuses. Un segment de véhicules qui leur assurent des marges particulièrement élevées.
Deux filières sont actuellement à l’œuvre, la première se charge des constructeurs européens, en proposant essentiellement des SUV luxueux, Mercedes, Audi, Land Rover, mais aussi des utilitaires et des ludospaces de Renault, Peugeot ou encore Volkswagen ; la seconde des importations depuis le Moyen-Orient, Dubai et Qatar avec des pick-up et des 4×4 d’origine japonaise, Toyota et Nissan particulièrement.
Il va sans dire que ces importations s’effectuent souvent dans le cadre des licences moudjahidine, sans paiement des taxes et droits de douane, et leur prix de vente sur le marché local dépasse tout entendement.
Et il est important de signaler que ces véhicules sont vendus en Algérie avec une garantie constructeur valable exclusivement dans le pays de destination initiale, sans extension pour une éventuelle réexportation et encore moins dans notre pays. Beaucoup de clients algériens l’on appris à leurs dépens, suite à des incidents techniques survenus en cours d’utilisation sur nos routes.
À ces deux filières, on peut ajouter le réseau de vente d’un reliquat important de véhicules assemblés localement de différentes marques, et qui a été détourné délibérément, avec la complicité des concessionnaires, du circuit officiel de distribution.
Véhicules d’occasion, le vertige des prix
Seul recours pour le citoyen lambda, le marché de l’occasion, où règne une faune d’intermédiaires et de revendeurs qui imposent leur diktat.
Les règles professionnelles sont assimilées à une hérésie dans cette jungle où tous les abus sont permis.
Un marché qui échappe à toute forme d’organisation avec une cotation irrationnelle qui ne repose sur aucun critère de qualité ou d’état général du véhicule. De précédentes tentatives de structuration de cet important marché ont échoué faute d’une véritable volonté politique de la part des autorités compétentes.
En plus d’un important manque à gagner pour le Trésor public, ce marché aurait pu être une alternative salutaire en ces temps de crise.
Actuellement et en raison des dispositions prises par le gouvernement pour lutter contre la propagation du Covid-19, les marchés hebdomadaires de vente de voitures ont été fermés, ce qui n’a pas empêché la prolifération d’espaces de transaction dans différents quartiers des principales villes du pays.
De même que des sites internet spécialisés proposent la publication d’annonces.
En tout état de cause, un constat s’impose, les circonstances actuelles du marché automobile en Algérie requièrent de la prudence de la part des clients potentiels. Il est évident que cette situation est plus favorable aux vendeurs qu’aux acheteurs.
Ces derniers gagneraient plutôt à attendre les éventuels changements promis par le gouvernement pour les mois à venir.
B. Bellil