Usine JAC / Emin Auto de Ain Temouchent : Les raisons d’un blocage
Le secteur automobile en Algérie connait une relance de ses activités après plusieurs années de blocage. Dans cette dynamique économique, le volet industriel s’impose comme un choix stratégique pour le pays et une alternative incontournable à l’effort financier considérable consacré aux importations.
De nouveaux textes réglementaires, cahier des charges et loi sur l’investissement ont été promulgués afin d’encourager les investisseurs et promouvoir le développement d’une véritable industrie automobile nationale et éviter un remake de l’expérience malheureuse précédente.
De toute la kyrielle de projets initiée sous l’ancien système, un seul sortait du lot en se distinguant par un atypisme, sans cesse rappelé et souligné par les médias nationaux. Il en est ainsi de l’usine de la marque JAC lancée par la Sarl Emin Auto en partenariat avec le constructeur chinois dans la wilaya de Ain Temouchent et visant la fabrication de camions de différents tonnages. S’étendant sur une superficie de 30 ha, ce projet entre dans le cadre du développement de la zone industrielle de Tamazoura et prévoyant la création de plus de 2 000 emplois directs, 7 000 indirects, le transfert technologique et surtout la mise en place d’un tissu d’équipementiers domiciliés dans des espaces limitrophes. Une opportunité pour booster l’activité industrielle, économique et commerciale dans cette région du pays et contribuer à son rayonnement social.
L’acharnement des barons de l’ancien système
Après avoir obtenu l’ensemble des autorisations, et l’achèvement des différentes études techniques, technologiques et de faisabilité, Emin Auto entame la réalisation des travaux de génie civil à partir de 2016. En parallèle, les équipements et matériels nécessaires à la mise en exploitation de l’investissement, ont été importés et acheminés sur site.
Mais c’était compter sans l’acharnement des anciens premiers ministres de Bouteflika, qui ont tout entrepris pour bloquer le projet et anéantir toute volonté de le mener à bout.
Contacté, le directeur général de la société Emin Auto, Nihat Sahsuvaroglu nous déclare « aujourd’hui et après avoir été réhabilité par la justice algérienne à travers l’arrêt de la cour suprême condamnant un blocage arbitraire, et à la faveur de la nouvelle démarche industrielle décidée par le gouvernement actuel et les orientations du Président de la République, nous avons relancé le projet dont le taux d’avancement a atteint les 80% tout en le mettant en conformité avec les nouveaux textes réglementaires. Les 20% restant représente la charpente métallique nécessaire pour la réalisation des ateliers ainsi que les équipements de montage actuellement entreposés au parc sous-douanes sur le site depuis plusieurs années ».
Il est à rappeler que JAC est l’une des trois premières marques à avoir obtenu, en mars 2023, l’agrément définitif pour l’importation avec recommandation express pour activer l’achèvement du projet de fabrication.
Des équipements à l’abandon
Néanmoins, le dossier introduit le 22/11/2023, auprès de l’AAPI (Agence Algérienne de Promotion de l’Investissement) pour la délivrance de l’attestation d’enregistrement de l’investissement, est resté sans suite en dépit de toutes les relances et des actualisations successives demandées. A ce jour, le seul motif de blocage invoqué par l’agence, se rapporte à la non observance par le notaire ayant établi en 2012, les statuts de la société, de la procédure d’exercice du droit de préemption détenu par l’Etat et les entreprises publiques. Une disposition abrogée depuis, par la loi de finances pour 2020.
A ce sujet, le premier responsable de Emin Auto, Nihat Sahsuvaroglu a tenu à préciser, « cette procédure liée au droit de préemption de l’Etat , en vigueur entre 2009 et 2019 relevait exclusivement des prérogatives du notaire et des services du ministère de l’industrie et, en notre qualité d’opérateur, nous ne disposons d’aucun droit ou moyen de regard ; l’essentiel pour nous c’est le respect des dispositions législatives relatives à la répartition du capital entre nationaux et étrangers (49 / 51%), ce que, du reste, nous avons observé scrupuleusement».
Pendant ce temps et depuis 7 années, les équipements de l’usine de JAC de Ain Temouchent restent entièrement immobilisés sur site et exposés aux caprices du temps et aux intempéries. Notons que ce projet intègre les différentes étapes de fabrication tels qu’énoncés par le cahier des charges, en l’occurrence, l’emboutissage, la peinture, la soudure et le montage et proposant des produits adaptés à de multiples applications professionnelles. Autant dire un niveau d’intégration dépassant les seuils réglementaires.
Le représentant en Algérie de la marque JAC dont l’Etat chinois est actionnaire, souligne également, « nous ne comptons pas baisser les bras pour faire entendre notre voix et permettre au pays de bénéficier de l’expertise du constructeur dans le domaine du véhicule utilitaire ».
B.Bellil